Le goût du bonheur
La saga de Marie Laberge
Gabrielle, Adélaïde et Florent. Trois prénoms, trois personnages, trois univers qui nous font revivre l’histoire du XX siècle depuis le Canada. Une guerre mondiale, le droit de vote aux femmes, des épidémies mortelles, des découvertes scientifiques. Avec Le goût du bonheur, Marie Laberge marque ma première rencontre avec la narrative canadienne. Grâce à sa plume, précise et féminine, j’ai reparcouru les événements historiques et politiques de tout un siècle en sortant de ma vision européenne.
Sur le fond, une autre époque, d’autres modes et des façons différentes de s’exprimer. Sur le devant, les mêmes batailles qu’aujourd’hui. L’éternelle lutte des femmes pour s’affirmer et faire cohabiter leurs multiples responsabilités et envies. L’éternel combat pour le droit d’aimer, au-delà d’un ‘genre’ affiché sur des papiers d’identité.
Je me suis vite attachée à chacun de ces trois personnages et des autres qui leur gravitent autour, tellement leur épaisseur émotionnelle est bien tracée au fil des trois volumes.
Le goût du bonheur, Gabrielle – Résumé du tome 1
Gabrielle est une femme, avant tout. Une femme qui aime et qui est aimée. Une femme vivante et vibrante. Une épouse passionnée. Gabrielle est une mère attentionnée et présente. Une cuisinière, une institutrice, une gouvernante. Elle est une dame dans la société canadienne des années 1930. Au bras de son mari, Edward, elle tient tête aux notables de Québec. Ses réceptions sont inoubliables, sa maison, impeccable, ses tenues toujours à la mode. Gabrielle est une battante, elle sait se mettre en colère pour défendre ses causes, mais elle sait très bien aussi se taire et rester à sa place. Elle doit être toutes ces personnes à la fois, sans se fatiguer, sans jamais montrer ses failles. Et le raccourci est si évident pour moi avec les femmes, épouses et mères que nous sommes encore aujourd’hui.
Gabrielle a quatre enfants, plus tous les autres dont elle s’occupe dans ses heures de bénévolat. Elle parle anglais, chose rare à Québec à l’époque, elle discute politique, elle est belle et élégante, en toutes circonstances. Elle essaie d’être partout, de donner à tous ses enfants le même amour, la même éducation, sans s’oublier non plus.
Elle goûtera au bonheur Gabrielle, jusqu’à la fin de sa vie, ou presque. Gabrielle, au fond, vivra pour toujours.
Le goût du bonheur, Adélaïde – Résumé du tome 2
Adélaïde est la fille aînée de Gabrielle et Edward. Enfant et puis femme dans le deuxième volume de la saga qui lui est consacré. Elle est intelligente, forte, intègre et colérique. Passionnée et féminine malgré elle. Comme sa mère, elle est une battante. Elle devra utiliser de toute son énergie pour affronter sa vie, pour s’affirmer pendant les dures années de la grande guerre. Elle expérimentera vite la perte et la défaite, à plusieurs niveaux. Adélaïde sera une femme de succès. Visionnaire, elle révolutionnera le monde du business et de la mode également. Elle incarne les premières grandes étapes de l’évolution professionnelle des femmes. Elles sera parmi les premières à porter le pantalon, au sens propre comme au sens figuré. Elle aimera de toute son âme et sera aimée en retour, mais à quel prix. Adélaïde souffre, mais ne se plie pas, elle ne se rend pas. Têtue et impulsive, elle apprendra tard qu’il faut parfois accepter pour avancer. Un homme la liera pour toujours à sa mère et cet homme ne sera pas son père.
Elle trouvera son bonheur Adélaïde, elle s’y accrochera pour s’en rappeler et pour en garder les miettes dans les moments les plus difficiles.
Le goût du bonheur, Florent – Résumé du tome 3
Florent, le sensible, le fragile et si fort pourtant. Florent le philosophe, l’observateur, le magicien dessinateur. L’artiste, l’être frêle qui marque la scène tout en restant dans l’ombre. Le personnage dont on ne soupçonne pas la puissance dans le premier tome et qui, au contraire, sera le collant émotionnel entre tous les protagonistes de cette saga. Florent et sa maladie, sa diversité, son hyper sensibilité. Ses insomnies génératrices. On a envie de le consoler, de le prendre dans nos bras, d’assister à l’un de ses défilés de mode. Il partage les pages de son livre avec Adélaïde. Ensemble, ils expérimenteront les multiples facettes de l’amour. Un autre homme les liant et les séparant à la fois.
Florent et Adélaïde nous réapprennent le sens du mot ‘famille’, de cet amour inconditionnel qui nous lie aux êtres qui nous sont chers. Le bonheur pour Florent, sera toujours lié à cette petite bulle à deux.
Réflexions sur la saga de Marie Laberge
Un peu comme dans le livre La possibilité du jour, j’ai remonté le temps avec cette saga. J’ai revécu les épisodes marquants de la deuxième guerre, les aberrations de la shoah, l’ascension des médias de masse, des puissances politiques sur l’échiquier mondial. Les crises économiques, les maladies. La mode, les avions, les voyages. L’argent, le pouvoir. La mort. La vie.
Et sur le fond, une seule et même quête pour tous : vivre entouré de l’amour des siens. Le plus paisiblement possible, le plus longtemps possible. Il n’est pas là, finalement, le Gout du bonheur ?