C'est moi,  Traditions

Les douceurs du partage

Les pâtisseries qui rendent le monde meilleur

J’ai grandi dans un pays catholique dans lequel la religion a toujours occupé une place importante. Pas toujours par conviction, mais plus souvent par habitude. Aujourd’hui, je vis dans un pays qui m’aura appris la mixité et que j’ai choisi dans le temps aussi pour cela. J’y repense pendant les jours qui suivent les festivités de l’Aïd, un événement qui me parle car basé, entre autres, sur les principes du partage.
La France est un état qui se définit laïc, comme témoignent les affiches accrochées à l’entrée de l’école de mes enfants. Dans ce pays, la liberté de culte fait partie des droits fondamentaux de l’humanité, alors aucune autorité publique, aucun fonctionnaire ne doit venir influencer les idées de nos enfants, porter un jugement envers leurs crédos ou laisser sous-entendre qu’une religion est plus importante qu’une autre.

À l’opposé, en Italie un crucifix est suspendu aux murs de chaque classe et il y reste encore aujourd’hui malgré les rares vagues de réclamation qui s’élèvent timidement de temps en temps sans grand succès. De plus, depuis le CP et jusqu’au bac, des heures de ‘religion’ étaient prévues dans l’emploi du temps des élèves au temps de ma scolarité. Je pense que c’est toujours le cas avec des assouplissements sur les contenus de ces enseignements. Le bout était de nous faire familiariser avec la multitude de religions qui se pratiquent dans le monde et d’en connaitre l‘histoire… mais, en réalité, nous abordions uniquement les principes de la religion catholique, du christianisme tout au plus. Il était possible d’avoir une dérogation pour sécher ces cours pour que dans de très rares cas, des enfants puissent être dispensés par cet exercice. Ces extraterrestres qui pouvaient errer dans les couloirs de l’école tandis que nous écoutions les 10 commandements et qui étaient regardés en travers par certains, enviés ouvertement par d’autres, m’intriguaient énormément : ils laissaient supposer qu’un autre point de vue était possible.

À première vue on serait donc amenés à penser par 2+2 que là où la liberté de culte est affichée est déclamée, elle est forcément appliqué et défendue. Et qu’en revanche, si l’étude d’une religion est imposée dès le plus jeune âge, ce même droit n’est plus là.

Alors, à quel niveau de cette échelle d’ouverture et tolérance envers le culte d’autrui se place le nombre exorbitant de fêtes catholiques célébrées en France ? Quelle est la place des autres festivités, liées à d’autres religions qui, par principe de laïcité, devraient venir contrebalancer le poids des autres ? Où est-ce qu’on place le mot mixité quand des ports ferment l’entrée à des bateaux voyageant au nom d’autres cultures, d’autres religions, peut-être d’une autre humanité ?  Liberté de culte et équité ne sont-elles donc pas censées marcher ensemble ?

J’en reviens à mon mot du début de cet article : le partage. J’aime à penser que l’étymologie des mots ne nous ment jamais quant à l’origine du poids de ce même mot dans la culture d’un pays. Le verbe ‘Partager’ vient du latin ‘partes agere’ qui signifie faire des parts ou des portions, mais aussi faire en sorte que chaque part contribue à une action collective, à un résultat commun. La traduction italienne de ce mot est ‘condividere’, encore un mot qui nous vient du latin ‘cum dividere’ : diviser avec les autres, se partager quelque chose.

« Faire des parts » d’un côté, se « les partager » de l’autre… on dirait qu’il nous faudrait un continuum entre ces deux mots dans ces deux langues pour aboutir au résultat espéré : se partager ce monde, pour qu’il en reste un petit bout pour chacun, pour que chacun y trouve son compte sans écraser l’autre tout en y apportant sa propre contribution.

Je partage des douceurs avec mes voisins à chaque fois que je prépare une bonne recette. Ils me le rendent à leur tour pour partager avec moi leurs traditions qui, forcement, deviennent un peu les miennes aussi. Un esprit de bienveillance et réciprocité c’est ainsi installé en partant de ces douceurs. Résultat : nous vivons dans une compréhension, une écoute et une entraide mutuelles, tout en parlant parfois deux langues complètement différentes et en invoquant chacun notre propre Dieu.

C’est peut-être une analyse simpliste et banale, mais c’est ma réalité à moi, qui marche à ma petite échelle. Si chacun y rajoutait sa petite brique à son niveau personnel aussi, nous partagerions des douceurs à rondeur de planète et ce monde serait probablement un monde de diabétiques…mais sûrement un monde ‘plus bon’ !

Merci Yamina :

Les beaux gâteux des photos de cet article nous ont été offerts comme tous les ans par nos voisins et leurs familles à l’occasion des festivités de l’Aïd. Ma chère voisine confectionne elle-même ces pâtisseries, qu’elle partage avec ses parents et ses frères et sœurs pour célébrer la fin du ramadan. Nous accompagnons de loin ces festivités dont l’esprit de pur retour à l’essentiel et de partage nous fascine énormément.

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